Le marketing et les 4 p : Prix, Prix, Prix et..Prix
A écouter les uns, lire les autres et observer la mutation des modes de consommation, on ne peut qu'être frappé par l'obsession du prix bas qui habite une majorité d'entre nous.
Du côté des acteurs économiques, entre ceux qui entendent "redonner le pouvoir au consommateur" et ceux qui font commerce de leur prétendue "défense du pouvoir d'achat" en écrasant les petits industriels et producteurs tout en prétendant ne pressurer que "les gros", la course à l'échalotte (importée de Chine) est lancée et bien lancée.
Cette quête éperdue du low-cost ne serait que l'illustration de l'affligeante hypocrisie des groupes de grande distribution (quelqu'un pourrait-il me donner le montant du patrimoine moyen d'un propriétaire d'hypermarché d'une certaine enseigne d'indépendants ou copie du compte de résultat de sa centrale d'achat qu'on voit vers qui le pouvoir d'achat a vraiment été transféré ?) s'il n'était le révélateur d'un phénomène plus général qui conduira (et conduit déjà) à un alignement par le bas de notre niveau de vie.
En effet, baisser les prix, c'est certes s'engager dans une louable démarche d'optimisation des coûts par l'amélioration des process et techniques, mais c'est aussi (et désormais surtout) sabrer dans la valeur ajoutée.
Or, c'est avec la valeur créée qu'on finance une entreprise, qu'on paie les salaires des collaborateurs qui sont aussi des consommateurs. Baisser la valeur ajoutée, c'est bloquer les salaires (ou pire conduire à la disparition d'un grand nombre d'emplois), c'est obliger le consommateur à rechercher un prix encore plus bas, ce qui conduit à une nouvelle baisse de la VA, ce qui conduit à rationnaliser encore davantage (à délocaliser)...etc etc...le cercle vicieux est enclanché.
Certes, l'évolution des prix sera peut-être minime mais le rapport à notre revenu moyen sera, lui, devenu défavorable.
Le constat posé, quelle place et quel rôle pour le marketeur dans la démarche d'enraillement de ce phénomène ?
D'abord, restons à notre place et laissons aux élections et aux politiques le soin d'arbitrer le choix de société qui s'offre à nous mais prenons à bras le corps la question de la création d'une valeur ajoutée réelle et différenciante. Depuis quelques années, les campagnes publicitaires vides de sens mais baties pour la recherche de l'impact mémoriel maximal (fut-il à long terme nocif pour la marque) se succèdent. Faute de projets plus ambitieux, on passe un petit coup de polish sur les logos de nos grandes entreprises. Tout ceci est décevant et déprimant.
Cessons de rester les yeux braqués uniquement sur nos ratios et nos tableaux de bord. Le "management cockpit" fait de nous des êtres désespérément raisonnables. Nous "pilotons" désormais l'entreprise sans même regarder le paysage qui défile autour de nous.
Réhabilitons la créativité, soyons à nouveau transgressifs (mais pas gratuitement), osons exprimer notre vision. Bref, ayons le courage de résister à la facilité, mais aussi à nos annonceurs quant ils nous réclament uniquement de l'efficacité à court terme. Refusons de répondre binairement à des problématiques complexes, soyons exigeants avec nous même et revendiquons cette exigence, mais surtout, prenons des risques (quitte à nous planter).
Les homme du marketing, parce qu'ils sont un chaînon essentiel dans le processus de rencontre entre l'offre et la demande doivent proposer autre chose, rechercher une originalité qui ne soit pas uniquement superficielle, disrupter en continu (et pas uniquement dans le discours publicitaire).
Nous devons "créer" de la valeur et ne pas nous contenter de simuler cette création.
A cette condition, les consommateurs pourront peut être à nouveau adhérer à des projets qui donnent de la perspective et facilitent leur projection dans l'avenir.
Certes, les marketeurs ne pourrons faire bouger la société à eux seuls, mais, dans notre monde, il est désormais difficile d'imaginer le faire sans eux.
Alors, on s'y met ?